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Homoland

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STAR 

Je ne suis pas un numéro 4
Collection automne hivers fin de siècle
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Homoland

L'interviewé - Homoland, c'est un projet en Allemagne, de gays radicaux anars qui luttent dans des mouvances antifascistes, squatts, groupes d'extrême gauche, etc.

Ça existe depuis six ans maintenant, avec deux rencontres par année, normalement sur une semaine, voire dix jours. Ça se tient à la campagne, en Allemagne du nord. On loue une baraque. C'est pas possible de faire un camping en Allemagne du nord au mois de septembre, par exemple... il fait trop froid.

La dernière rencontre était la douzième édition. Maintenant, il y a une quarantaine de personnes à chaque fois contrairement à il y a trois, quatre ans, où il n'y avait que vingt, vingt-cinq personnes.

Homoland, ce n'est pas seulement la rencontre c'est aussi tout un travail derrière. Homoland c'est aussi un réseau d'échanges entre gays radicaux d'extrême gauche, anars, etc, et il y a aussi un fanzine dans lequel écrivent les gens qui, pour la plupart, vont à ces rencontres, qui écrivent des articles. Ce fanzine permet de préparer des sujets pour les futures rencontres, ou bien de continuer la discussion autour d'un sujet déjà traité lors d'une rencontre. ça permet d'approfondir certaines choses.

Parmi les gens qui viennent à Homoland, qui écrivent dans ce fanzine, il y a de nombreux berlinois, bien sûr. Ils sont bien structurés, il y a tout un milieu gay alternatif, voire anar. Il y a aussi des gens d'autres villes, de villes plus petites. Ce sont des gens qui souvent sont assez seuls, en tant que pédé, dans leur lutte anar, antifacho, etc. Ça leur permet de se retrouver dans un cadre avec d'autres pédés, qui ne sont pas du milieu gaytto commercial mais des pédés avec qui on a une lutte en commun.

L'intervieweur - Est-ce que tu peux donner des exemples de discussions, de thèmes qu'il y a eu dernièrement ?

L'interwievé - oui.

Il y a bien sûr de nombreux thèmes qui sont discutés.

Un sujet qui est discuté maintenant depuis deux ans régulièrement, qui est dur a traiter, c'est l'abus sexuel, la violence sexualisée, la pédophilie.

C'est une discussion très dure parce que les avis sont partagés. Le niveau de connaissance en la matière varie énormément. Il y a des gens qui ont travaillé dans des groupes pendant dix ans là-dessus, il y a des gens pour qui ce sujet est absolument nouveau.

Mais là, en l'occurence, c'était difficile parce que nous y étions directement confrontés.

Il y a un an et demi, un type, gay, est venu à Homoland et a fait son outing de violeur le deuxième jour. On était, là, directement confronté à un auteur de violences. Il y avait pas mal d'anciennes victimes parmi nous. Ça a donc créé d'énormes problèmes parce qu'on ne savait pas comment réagir. On n'est pas structuré, hiérarchisé, ce qui aurait permis qu'une personne décide de ce qu'on avait à faire. Non, il fallait qu'on décide ensemble. Il y avait beaucoup de gens qui n'étaient pas capables de participer à cette décision parce qu'ils étaient complètement dépassés par ce sujet, par méconnaissance, par ignorance du problème.

C'était un sujet qui était très important et qui a remis en cause Homoland, qui a remis en cause une rencontre de pédés qui, deux fois par années, se rassemblent pour tchatcher politique, lutte, etc... d'accord, mais parmi nous, il y a aussi des victimes, et on ne peut pas nier la possibilité qu'il y ait également des auteurs. A ce moment là, Homoland a vécu cette crise, et en même temps, on ne savait plus comment continuer. Les crises s'enchainaient les unes après les autres.

Et puis, il y a les gens qui ont construit Homoland il y a six ou sept ans qui ne se retrouvent plus tellement dedans aujourd'hui. Ils ne viennent plus aussi fréquemment. Ils sont un peu retirés. Ils écrivent toujours des articles dans le fanzine, mais ils ont de la peine avec cet Homoland d'aujourdhui où il y a un tiers de gens nouveaux à chaque fois. C'est bien, ça fait toujours une dizaine de gens en plus dans le réseau, ça rafraichit mais ça fait pas avancer les discussions. Les gens qui sont dedans depuis des années auraient envie d'avancer, plutôt que de répéter et d'avoir l'impression d'être un peu les profs par rapport aux jeunes qui viennent d'arriver.

L'intervieweur - Est-ce que les pédés présents à Homoland travaillent, luttent, avec les femmes, les lesbiennes, avec les groupes lesbiennes radicales, avec les groupes féministes radicales, dans leurs villes respectives ? Ou, est-ce qu'ils luttent de façon séparée ?

L'interviewé - Ça dépend de la ville. A Berlin, la ville gay anar la plus importante en Allemagne, la ville où il faut aller, il y a tout une infrastructure, il y a un groupe gay anti-fa qui fait son bar une fois par semaine, il y a un squatt gay autour duquel il y a des luttes. Les gens qui y habitent, les gens qui y vont sont dans d'autres luttes aussi, surtout les luttes anti-fascistes, et ce qui est très à la mode ces temps-ci, dans les luttes anti-nucléaires, etc. A Berlin, on peut presque parler d'un "milieu" gay anar, et dans ce cas-là les contacts sont difficiles car tout est structuré, tout est organisé. Les gens ont pas mal de contacts avec des féministes au niveau privé, car elles sont très nombreuses, les contacts avec les groupes femmes existent, c'est-à-dire, beaucoup au niveau de l'organisation, c'est un groupe qui va rencontrer un groupe.

Ce qui est différent dans d'autres villes.

Mais je n'habite pas en Allemagne et je ne sais pas dans le détail où en sont les contacts avec les femmes.

Lors de la dernière rencontre Homoland, on a eu le plaisir de rencontrer des femmes qui faisaient un camping féministe (hétéros et lesbiennes) dans le même village. Elles faisaient un camping avec presque deux cents femmes qui se rencontraient sur une période de deux mois. Deux mois à vivre ensemble c'est énorme, on vit ses crises au quotidien. Ce qui n'est pas notre cas, puisqu'on se voit deux fois une semaine par année. C'était très intéressant de les rencontrer. Là, il y a un groupe dans Homoland qui s'est formé pour s'occuper des contacts avec ce groupe femmes, femmes qui viennent de nombreuses villes dans lesquelles elles sont dans des structures féministes.

C'est intéressant que des pédés de nombreuses villes rencontrent des structures féministes un peu pareilles.

Sinon, comme je l'ai dit tout à l'heure, à Homoland, il y a aussi des pédés en lutte qui viennent parce qu'ils sont très seuls dans leur ville. Là, des projets se font. À Hamburg, il y a un bar gay-anar qui fait un travail d'information, sur la situation des pédés en Roumanie par exemple. À Brême, il y a un groupe gay radical qui s'occupe surtout du problème pédosexualité, la violence sexualisée contre les enfants. Au centre autonome Heidelberg, il y a aussi un bar les-bi-gay radical anar deux fois par mois, où ils essaient de créer un lieu où peuvent se rencontrer des gens qui n'ont rien à voir avec l'anarchisme et des anars qui n'ont rien à voir avec les lesbiennes et pédés, etc.

Homoland, ça permet de se connaître, d'avoir des amiEs dans ces villes là, de faire la fête ensemble. Ça crée des amours, des amitiés.

L'intervieweur - Est-ce qu'il y a un lien entre Homoland et les Tantes de la Mainzer Strasse qui s'étaient faites expulsées il y a quelques années, à Berlin ?

L'interviewé - Pour faire un petit historique, en 1990, il y avait à Berlin-est, dans la Mainzer Strasse, ce squatt gay intégré dans une rue entièrement squattée, parfaitement intégré dans les luttes de squatteurEs à ce moment-là.

Maintenant, à Berlin, il y a toujours un squatt gay, au même nom, Tuntenhaus. C'est la suite du projet de la Mainzer Strasse. C'est une autre génération qui vit là, même s'il y a encore quelques vieux loups.

La Mainzer Strasse, c'est le grand mythe, c'est le grand idéal qu'on n'a plus jamais réussi à atteindre. D'ailleurs, il vaut mieux ne pas en parler aujourd'hui dans la Tuntenhaus (maison des tantouzes), ne pas évoquer ce mot. A chaque fois qu'on en parle, on se dit "oui à la Mainzer Strasse c'était bien mieux organisé, et puis on était bien plus radicaux à l'époque", il y a une espèce de nostalgie qui s'est créée autour de ce mythe.

L'intervieweur - Oui, puis la nostalgie c'est plutôt nuisible dans ce cas-là.

L'interviewé - Oui.

L'intervieweur - Parce que ça t'évite de te motiver, de te mobiliser un peu.

L'interviewé - Mais finalement, aujourd'hui, les groupes sont plus nombreux, donc...

L'intervieweur - La Mainzer Strasse, c'était le début de l'histoire ?

L'interviewé - C'était un peu un début. Les gens de la Tuntenhaus de l'époque ont fait un colloque à Berlin en 1991 ou 1992 qui s'appelait "Anarchie et sensualité". C'était une première rencontre interville de gays anars. C'est plus ou moins là qu'est née l'idée de faire une rencontre régulière à la campagne. Au début des années 90, on s'est retrouvé surtout à Berlin pour faire des rencontres de gens de plusieurs villes. A la suite, les gens ont eu l'idée de faire une rencontre à la campagne, et pas seulement sur un week-end mais sur une semaine, non pas seulement pour se rencontrer, mais pour vivre ensemble.

L'intervieweur - Et maintenant, est-ce qu'il y a un thème à chaque semaine de camping ? Est-ce que c'est préparé à l'avance ?

L'interwiewé - Ça dépend, il y a tellement de changement à chaque fois. Chaque rencontre est tellement différente de l'autre. A chaque fois, il y a de nouveaux problèmes. Avec un tiers de gens nouveaux qui arrive, qui est là pour regarder, écouter, donner un coup de main. Tout le monde n'est pas tout de suite impliqué dans tout, tu vois, au niveau organisation, au niveau thématique. Et puis, il y a aussi des tensions qui reviennent à chaque fois, par rapport à certains sujets, par rapport à la structure de Homoland. Il y a, donc, une structure à refaire à chaque fois, c'est-à-dire, une structure qui n'est pas déterminée. Homoland est censé s'organiser de manière autonome. Chacun s'implique, mais on sait bien que ça implique des problèmes aussi, parce qu'il y a des gens qui vont faire souvent la vaisselle, y'en a d'autres qui ne vont jamais la faire, y'en a d'autres qui trouvent qu'il est maintenant absolument nécessaire de parler d'un sujet bien précis parce que ça urge, puis y'en a d'autres qui disent qu'ils n'ont pas envie de se faire imposer un sujet, mais qu'ils ont envie de parler d'autres choses. Bien sûr, à chaque fois il y a des difficultés. La dernière rencontre au mois de septembre (97), on avait des difficultés à démarrer, on était un peu moins nombreux au début, cette fois-ci on était une trentaine. On avait de la peine à démarrer parce qu'on trouvait pas de sujets. On était un peu paumé au début, on savait pas trop comment s'organiser, personne voulait s'occuper de ça par crainte de s'imposer. C'était lié aussi au fait qu'il y a beaucoup de vieux loups qui ne sont pas venus cette fois-ci pour d'autres raisons, bien sûr. On avait donc de la peine à démarrer mais finalement, ça a quand même bien marché. Puis, bien sûr, la fin c'est toujours le moment le plus triste, quand on va se séparer. On s'embrasse. Puis on se dit "oui, on va se revoir", et puis "oui, je vais venir te voir dans ta ville" puis ça ne se fait pas toujours.

L'intervieweur - Tu veux rajouter quelque chose ?

L'interviewé - Oui.

Homoland est souvent critiqué, notamment dans le fanzine. On critique Homoland, on remet en question. Et puis, il y a des gens qui sont en colère, qui disent "je ne reviendrai plus". Et pourtant, à mon avis, c'est important Homoland, pas seulement au niveau de l'organisation, pas seulement pour avoir un réseau, des structures, etc, au niveau national en Allemagne, pas seulement pour avoir des échanges avec, notamment, des hollandais, un français, des gens de Suisse qui viennent régulièrement. Je crois que c'est aussi important pour les individus, de se retrouver avec une trentaine, une quarantaine de pédés qui sont comme eux, qui sont un peu dans les mêmes luttes. Il y a des amitiés qui se créent, c'est une semaine de câlins, de tendresses, de remises en question bien sûr. Mais sur une semaine, on a tellement de choses à vivre, des sentiments, des émotions... Je crois que ça aussi c'est important, c'est vachement important !

L'intervieweur - Le côté quotidien, en fait. Le fait de sortir de son isolement, de sa solitude. J'imagine que ça doit être différent pour les pédés anars qui arrivent de Berlin et les pédés anars qui arrivent d'un petit village. Ça ne doit pas avoir la même grandeur, la même dimension le fait de se retrouver là. Je me dis que ça doit être effrayant au début, non ?!

L'interviewé - Oui, tout à fait. Homoland, le pays des homos, c'est quelque part une utopie. Ce qu'on vit là-bas, deux fois par année pendant une semaine, c'est une réalité qui serait pas possible dans nos quotidiens. C'est quelque part des vacances, c'est à chaque fois inoubliable, mais ce n'est pas applicable au quotidien, dans une ville. Et c'est pas possible de créer ça comme un projet d'isolement à la campagne de quelques pédés anars. Donc à ce niveau-là, ça reste une rencontre.

Voilà. Dimanche 15 février 1998

 

Les résisTantes

affiches collées et tracts distribués lors de l'occupation des anciens bâtiments ANPE de Lyon-presqu'ile, hiver 97/98.

Les résisTantes communiquent

Leur solidarité avec le mouvement actuel des chômeuses, des chômeurs, des RMIstes, des précaires,

Leur solidarité avec les retraitéEs, les personnes migrantes, les personnes handicapées, les personnes malades, les personnes séropositives,

Leur solidarité avec toutes et tous les sans-abris, les sans-sous, les sans-terres, les sans toit ni loi, les sans droit ni titre, les sans-papiers, les sensibles d'ici, du Brésil, du Chiapas, du Zimbabwe, de Palestine, de Chine, d'Indonésie, et de partout ailleurs...

Leur haine du mépris et de la haine. rappellent

Que lorsque N. Nota est traitée de "salope", elle n'est pas jugée sur sa fonction ou sur ses (manques de) compétences mais sur le fait qu'elle soit une femme. On ne dit jamais que Vianet est une "tronche de pine" ou un "sale macho" lorsqu'il est incompétent.

Que lorsque R. Barre est traité "d'enculé", il n'est pas jugé sur sa fonction ou sur ses choix politiques, mais assimilé aux "enculés" à savoir les pédés, les hommelettes, les tarlouzes et autres... On ne dit jamais que Chirac est un "sale hétéro" lorsqu'il est incompétent.

Qu'une raclure de fond de poubelle est une raclure de fond de poubelle, il n'est donc point besoin d'associer l'image des femmes et des homosexuelLEs aux injures et à la colère que nous avons toutes et tous envers les maîtres.

Que tant qu'il y aura des maîtres, il y aura des esclaves.
Que tant qu'il y aura des esclaves, il y aura des maîtres.
Que tant qu'il y aura de l'argent, il y en aura jamais assez pour tout le monde.

Que le libéralisme et le patriarcapitalisme sont des mondes de maîtres, d'esclaves et d'argent.
Que, par conséquent, l'exclusion n'en est pas une des conséquences mais une des particularités.
Que les femmes en sont les premières victimes, ici et partout ailleurs.

Que des femmes et des hommes sont licenciéEs, insultéEs, maltraitéEs, battuEs, violéEs, ou assassinéEs parce qu'elles ou ils sont femmes, lesbiennes, pédés, transgenres... Ici et partout ailleurs.

et revendiquent

Leur entière solidarité avec les personnes prostituées, femmes, hommes, transgenres, sujets des plus grands des mépris autant dans les classes sociales bourgeoises, que dans les classes moyennes ou prolos.

Les 35 heures (minimum) d'amour par semaine.

...Parce que si nous souhaitons réellement que les choses ne soient plus comme avant, si nous souhaitons réellement participer à la transformation de ce monde immonde, avec ce que l'on a, avec ce que l'on est, alors il faut dès maintenant tanter de se changer soi-même.

Avec tout le respect. Affectueusement.
Une résisTante parmi Tante d'autre..